Jean-Claude Landry et Jean-Marc Lord. Collaboration spéciale.
15 février 2020
Le 28 janvier dernier, le président Trump dévoilait son plan pour «régler» le conflit entre Israéliens et Palestiniens. Toutefois, la majorité des observateurs de la politique internationale craignent au contraire que ce «deal du siècle», comme l’appelle le président américain, n’aggrave la situation et relance un cycle de violence dans tout le Moyen-Orient.
L’enjeu majeur du conflit
Pour bien comprendre, il faut d’abord se rappeler que l’enjeu majeur du conflit entre Israéliens et Palestiniens est avant tout lié à la possession de la terre. Le territoire disputé aujourd’hui était peuplé à l’origine d’une majorité de Palestiniens d’origine arabe. Victime de discrimination et de persécutions en Europe, la population juive de ce continent, répondant à l’appel au retour vers la «Terre promise», commence dès le début du siècle dernier à émigrer en Palestine, alors sous mandat britannique. Cette émigration s’est accélérée suite aux affres vécues par les personnes d’origine juive lors de la Deuxième Guerre mondiale. Avec l’augmentation de la population juive, la revendication historique pour la création d’un État juif en Palestine s’est alors transportée aux Nations-Unies où une résolution de partition de la Palestine en deux entités distinctes, palestinienne et israélienne, a été adoptée par le conseil de sécurité de l’ONU en 1947. Ceci, au grand dam de la population arabe, majoritaire, qui habitait ce territoire de même que de tous les pays arabes voyant là une spoliation de territoire contraire aux droits de la population palestinienne. De nombreuses guerres ont suivi occasionnant, à terme, l’occupation militaire par Israël de l’ensemble du territoire palestinien et un exode d’une partie importante de la population palestinienne vivant dorénavant dans des camps de réfugiés qui accueillent aujourd’hui plus de cinq millions de Palestiniens. Invoquant le droit international, l’ONU exige de l’État d’Israël la fin de l’occupation militaire, le démantèlement des colonies de peuplement implantées en territoire palestinien et un accord sur le retour des réfugiés palestiniens. Mais, fort du soutien financier, politique et militaire des États-Unis, l’État d’Israël reste sourd aux appels et aux pressions pour qu’il respecte le droit international.
Le plan de « paix » du président Trump a été dévoilé en grande pompe le 28 janvier dernier en présence du premier ministre israélien Benyamin Netanyahu, mais en l’absence de tout dirigeant palestinien. Les observateurs de la scène internationale reprochent à ce plan de répondre en tout point aux attentes de la partie israélienne et d’ignorer totalement celles de la partie palestinienne.
Tout pour la partie israélienne
On reproche au plan de paix Trump, annoncé en grande pompe en présence du premier ministre israélien Netanyahu, mais en l’absence de tout dirigeant palestinien, de répondre en tout point aux attentes de la partie israélienne et d’ignorer totalement celles de la partie palestinienne. Le plan prévoit notamment l’annexion par Israël des colonies implantées illégalement en Cisjordanie occupée, en particulier dans la vallée du Jourdain, qui doit devenir la frontière orientale d’Israël. Il ignore tout règlement sur la question des réfugiés palestiniens et octroie aux Israéliens le contrôle total de Jérusalem, ville sainte pour les Chrétiens, les Musulmans et les Juifs. Toujours en vertu de ce plan, un hypothétique État palestinien ne disposerait d’aucun attribut reconnu à un État normal puisqu’il n’aurait aucune souveraineté sur ses frontières, sa sécurité, le transport aérien et naval, l’eau de ses nappes phréatiques, etc. L’application d’un tel plan fait dire à la prestigieuse revue britannique The Economist qu’il rendrait tout à fait non viable un futur État palestinien. En effet, la carte topographique de cet État ressemblerait à des dizaines de parcelles de territoire éparpillées, enclavées et reliées entre elles par des routes et tunnels traversant le territoire israélien. La Palestine qui devait, selon le plan de partage de l’ONU de 1947, occuper environ la moitié de son territoire historique se verrait confinée à une infime portion du territoire initial.
Ce parti pris évident en faveur de l’État d’Israël au détriment des Palestiniens fait dire aux observateurs de la scène internationale et du Moyen-Orient que «le plan Trump» est mort-né. Yakov Rabkin, professeur d’histoire à l’Université de Montréal, qualifie celui-ci de «triomphe du discours de l’extrême droite et de cadeau de taille pour le premier ministre Netanyahou».
Convaincre un Palestinien de négocier sur la base de ce plan s’avère de toute évidence un défi qu’il sera impossible de relever.
Jean Claude Landry et Jean-Marc Lord