PAR PIERRE LAVERGNE. COLLABORATION SPÉCIALE.
Le besoin d’une refonte en profondeur de son économie, jugée trop peu performante, le constat d’une évolution majeure des mentalités de la population cubaine, notamment en matière de diversité sexuelle, et l’idée de construire une société communiste ayant fait place à l’objectif de créer une société socialiste ont amené le gouvernement cubain à proposer une mise à jour de la Constitution datant de 1976. Cela a donné lieu à un exercice de participation sociale dont plusieurs pays pourraient prendre exemple.
La démarche de refonte a débuté en 2013 et a conduit à la formation par le Parlement cubain d’une commission composée de 33 parlementaires, laquelle avait pour mandat d’élaborer une proposition préliminaire. Après avoir étudié différentes constitutions adoptées à-travers le monde, la commission a déposé au Parlement un avant-projet auquel certaines modifications ont été apportées. Le projet amendé a ensuite été soumis au débat public pendant trois mois afin que la population cubaine puisse suggérer des modifications, ajouts et retraits d’articles. Cette démarche n’aura pas été vaine. On évalue en effet à 60% la proportion de l'avant-projet qui a fait l’objet de modifications suite aux propositions faites par la population.
Il faut savoir que le gouvernement cubain avait des attentes élevées au niveau de la participation citoyenne à l’exercice de révision. Tous les secteurs ont été interpellés : syndicats, comités de quartier, milieux d’enseignement, organisations féminines, organisations agricoles, etc. De plus, les citoyens pouvaient s’informer quotidiennement via la télévision cubaine à laquelle on présentait chaque jour une émission animée par des juristes expliquant chacun des articles et répondant aux interrogations du public.
Trois citoyens sur quatre auyant participé à la démarche de consultation, il ne faut pas s’étonner que le taux de participation s’élève à 85% au référendum sur la Constitution et que celle-ci ait été approuvée par plus de 86% des personnes votantes.
Au plan politique, le projet de construire une société communiste inscrit dans la Constitution précédente fait dorénavant place à celui de créer une société socialiste. Au niveau de la gouvernance, la nouvelle Constitution prévoit la création du poste de premier ministre avec un mandat d’une durée de 5 ans. Elle limite également à 2 le nombre de mandats qu’un individu peut exercer à la présidence du pays. Les titulaires de ces deux postes seront nommés par les 603 députés de l’Assemblée nationale.
Au plan économique, la nouvelle Constitution reconnaît maintenant la contribution potentielle de l’économie de marché et du développement encadré de la propriété privée en plus d’encourager l’investissement étranger.
En matière de justice, une personne en état d’arrestation, comme dans l'ancienne constitution, peut faire appel aux services d’un avocat. La Constitution reconnaît également aux citoyens le droit de recours contre l’État en raison de dommages et négligence dont celui-ci se serait rendu responsable.
Enfin mentionnons qu’au plan social, la constitution reconnaît le mariage de personnes de même sexe. Cette dernière proposition a suscité un vif débat au sein de la société. Plusieurs églises cubaines ont tenté sans succès que cet article ne soit pas inclus dans la nouvelle constitution. Quoiqu’il en soit, la population cubaine a tranchée et la famille est dorénavant reconnue sans égard au genre des personnes qui la composent.
Pour lire la nouvelle Constitution cubaine en français.
Le projet de construire une société communiste inscrit dans la Constitution cubaine de 1976 fait place, dans la nouvelle Constitution, à celui de créer une société socialiste.