RenauD Goyer. Collaboration spéciale.
Le 28 avril dernier, les Espagnols ont reporté au pouvoir le Parti socialiste de Pedro Sanchez, permettant à ce dernier de gagner non seulement ses élections, mais également son pari de négocier un gouvernement de coalition avec le parti de gauche Podemos. Son gouvernement était parvenu au pouvoir l’an dernier à la suite d’une motion de censure contre le gouvernement du Parti populaire (parti conservateur) motivée par des allégations de corruption.
La constitution d’une coalition
Maintenant réélu, Pedro Sanchez n’a toutefois pas la majorité des sièges à la chambre basse des Cortes Generales (Parlement du Royaume d’Espagne) ce qui le forcera à des alliances qui pourraient nuire au Parti socialiste à long terme. L’appui de Podemos lui est garanti, mais il est insuffisant pour lui assurer la majorité au parlement.
Trois options s’offrent à Sanchez et à son parti :
1. Tenter de diriger avec un gouvernement minoritaire à l’aide d’ententes à la pièce avec les autres partis selon les projets de loi ;
2. Proposer une coalition avec Podemos et Ciudadanos (parti libéral) assurant au Parti socialiste la majorité, ce que Sanchez a juré de ne pas faire ;
3. Former une coalition avec Podemos et les indépendantistes catalans et basques.
L’impact sur les élections municipales
Cette dernière option est périlleuse pour le Parti socialiste qui pourrait se mettre à dos plusieurs électeurs à la veille des élections municipales qui se tiendront le 26 mai prochain en Espagne. Les socialistes et les conservateurs étant présentement nez à nez, les électeurs hostiles au mouvement indépendantiste pourraient alors se tourner vers Ciudadanos ou le Parti populaire.
En effet, à Madrid, depuis les élections législatives du 28 avril dernier, les sondeurs projettent plutôt l’arrivée d’un maire provenant de la formation Cuidadanos grâce à l’élection d’une majorité de conseillers municipaux provenant de ce parti, du Parti populaire et de VOX, la nouvelle formation d’extrême-droite qui vient tout juste d’entrer au parlement. Dans une Espagne où les secteurs économiques de l’immobilier et du tourisme représentent une part extrêmement importante du PIB au sein desquels les mairies jouent un rôle majeur, ces élections ne sont pas anodines. Le taux de chômage de l’Espagne étant parmi les plus élevés d’Europe, les jeunes se tournent de plus en plus vers les municipalités pour trouver des solutions à la crise.
Changement de cycle
L’enjeu de la coalition n’est donc pas mince pour la gauche espagnole qui pourrait voir la fin du cycle amorcé par le parti Podemos en 2014. La montée de ce parti était l’histoire de la dernière décennie de la politique espagnole. Après avoir remporté plusieurs mairies par la suite, dont celle de Barcelone et de Madrid, Podemos pourrait payer le prix électoral de son appui indéfectible aux socialistes en perdant ces mairies.
Or, c’est maintenant l’extrême-droite qui a le vent en poupe, et qui porterait, semble-t-il, la voix du changement. Même si Vox est loin de former un gouvernement, tant au niveau national que municipal, il devient un joueur important dans la formation des coalitions et dans la définition de l’agenda politique. Toujours d’après les projections, des conseillers municipaux de ce parti feraient leur entrée dans les conseils municipaux de Madrid, de Séville et de Saragosse. Seul Barcelone résisterait à cette tentation, étant la source même du discours de mécontentement de Vox qui s’alimente au sentiment anti-indépendantiste catalan. Le résultat des élections municipales promet donc d’avoir un impact non seulement sur les villes, mais également sur toute la politique espagnole.
Aux élections législatives du 28 avril dernier, les socialistes de Pedro Sanchez ont obtenu le plus grand nombre de sièges au Parlement d’Espagne. N’ayant pas obtenu la majorité absolue des sièges, ils devront trouver une formule qui leur permettra de gouverner efficacement alors que le parti VOX (formation d’extrême-droite) connait une inquiétante popularité.