COLOMBIE. LA GAUCHE CRÉE LA SURPRISE AUX ÉLECTIONS

par alice grinand. collaboration spéciale

Le 17 juin dernier, quelque 36 millions de Colombiennes et de Colombiens étaient appelée-e-s aux urnes pour élire leur nouveau président. Avec 53,98% des voix au second tour, Ivan Duque, candidat du Centre démocratique (droite), sera donc investi du rôle de président à compter du 7 août prochain.

Il succédera ainsi à Juan Manuel Santos, qui ne pouvait pas se représenter, puisque la Constitution colombienne interdit de se représenter au-delà de deux mandats. La présidence de ce dernier aura été marquée par la mise en place d’un processus de paix avec les FARC (Forces armées révolutionnaires de Colombie, devenu le parti politique Force alternative révolutionnaire commune). La principale guérilla du pays a finalement déposé les armes, après un demi-siècle de conflit, ce qui a valu à Santos le prix Nobel de la Paix en 2016, mais également une cote de popularité au plus bas.

Néanmoins, le processus de paix reste un sujet clivant au sein de la population colombienne. C’est notamment sur ce terrain qu’Ivan Duque a mené campagne, en promettant une révision de l’accord de paix s’il était élu.

Néanmoins, selon un sondage de la firme Invamer de mai 2017, les attentes de la population colombienne concernent principalement les enjeux socioéconomiques (lutte à la pauvreté et au chômage, accès aux soins et à l’éducation) et la lutte à la corruption. Pourtant, le futur président est accusé par l’opposition de n’être qu’une marionnette d’Alvaro Uribe, au pouvoir de 2002 à 2010 et notamment promoteur d’une ligne dure à l’encontre des anciens guérilleros. Uribe est régulièrement confronté avec la justice, notamment pour ses liens avec les paramilitaires.

Finalement, c’est Gustavo Petro, cet ancien guérillero du Mouvement du 19 avril (M19, une guérilla armée devenue un parti politique légal en 1990) et ancien maire de Bogota, qui aura créé la surprise dans ces élections présidentielles. Malgré sa défaite, il sera parvenu à un exploit : rafler 41,8% des voix au deuxième tour. Du jamais-vu en Colombie pour un parti de gauche, qui était pour la première fois présente au second tour.

Sa campagne faisait la part belle à la lutte aux changements climatiques, les inégalités, l’éducation ou encore la remise en question d’un système économique basé sur l’exploitation du charbon et du pétrole. C’est peut-être ce qui a permis l’adhésion d’une part croissante de la population, dans un pays qui souffre d’inégalités criantes et de corruption.

Si le conflit a miné le pays, le processus de paix permet néanmoins à la Colombie d’entamer une transition. Ainsi le peuple de Colombie a élu Ivan Duque pour diriger le pays dans ces eaux troubles. Notons que pour la première fois dans l’histoire du pays, une femme a été élue au poste de vice-présidente.

Mais pour diriger le pays, Duque et son équipe devront également composer avec une opposition menée par Gustavo Petro. Comme le prévoit la Constitution colombienne, celui-ci obtiendra un poste de sénateur, mandat qu’il avait déjà occupé auparavant. La gauche n’a peut-être pas dit son dernier mot en Colombie.


Légende : Si c’est le candidat de la droite, Ivan Duque, qui a remporté les élections présidentielles en Colombie le 17 juin dernier, c’est bien Gustavo Petro (sur la photo) qui a créé la plus grosse surprise en parvenant à mener la gauche au deuxième tour avec un score de 42 %.