par jean-Claude landry. collaboration spéciale.
En septembre 2000 avait lieu, au siège des Nations-Unies, la plus grande rencontre de chefs d'État et/ou de gouvernement jamais tenue dans le monde. Les dirigeants des 189 États membres de l’ONU s’étaient alors engagés à relever le défi de réduire l'extrême pauvreté et de construire un monde plus sûr, plus prospère et plus équitable. Si un monde plus sûr, plus prospère et plus équitable est encore à venir, la bonne nouvelle c’est que le défi de la lutte contre l‘extrême pauvreté a été relevé avec succès.
De réels progrès réalisés
En effet, les fléaux de la faim et de l’extrême pauvreté ont enregistré des reculs importants au cours des trois dernières décennies. De 1990 à 2017, le taux de personnes vivant dans une situation d’extrême pauvreté (vivant avec moins de 2,50 $ par jour) est passé de 35 % à 9 %. La mortalité infantile a également connu une baisse notable avec six millions de vies épargnées en 1996 par rapport à l’année 1990. Et à ces bons résultats s’ajoutent l’allongement de l’espérance de vie et l’augmentation du revenu moyen dans de nombreux pays.
Les défis sont encore très grands
S’il y a lieu de se réjouir de ces bons résultats, les observateurs avisés invitent toutefois à la prudence. Des situations ou évènements imprévus risquent toujours de ralentir la progression voire même d’inverser la tendance. L’accès au pouvoir de dirigeants toxiques, la multiplication des guerres, des récoltes désastreuses, l’accaparement des terres agricoles à des fins de spéculation, la résurgence ou le rebond de maladies contagieuses ou transmissibles comme la malaria ou le sida en sont quelques exemples.
À ces écueils s’ajoute le défi de continuer à progresser en dépit d’une économie mondiale léthargique. On ne peut donc plus compter sur la seule croissance économique pour faire des gains au chapitre de la lutte à la pauvreté. Et même si la chose était possible, on s’interroge de plus en plus sur la capacité de la planète à absorber le choc et les conséquences d’une forte croissance continue. Dans un tel contexte, quelle peut donc être la clé permettant de continuer à faire des gains sur le front de la lutte à l’extrême pauvreté?
Quelles sont les solutions ?
Une étude rendue publique par la Banque mondiale propose une réponse percutante : réduire les inégalités. Six stratégies sont proposées : le développement de la petite enfance, une couverture médicale universelle, l’accès universel à une éducation de qualité, des transferts monétaires aux familles démunies, la mise en chantier d’infrastructures rurales notamment les routes et l’électrification et enfin la mise en place d’une fiscalité progressive. Vaste programme.
Vaste programme, mais aussi véritable retournement de l’histoire que cette approche proposée par la Banque mondiale. L’institution a en effet longtemps soutenu que les inégalités étaient une condition au démarrage de la croissance étant entendu que l’épargne accumulée par les plus riches se traduirait éventuellement par une plus grande activité économique. Ce qu’on nomme aujourd’hui la théorie du ruissellement qui veut qu'enrichir les riches profite à tout le monde.
Virage à 180 degrés pour cette prestigieuse institution internationale, mais surtout virage qui ne peut qu’être bénéfique aux plus démunis de notre planète.