par alice grinand. collaboration spéciale.
Alors que tous les projecteurs sont tournés vers la crise espagnole après le référendum en Catalogne, un autre peuple, les Kurdes d’Irak, subit aujourd’hui les conséquences de sa volonté d’autodétermination après un référendum passé presque inaperçu en septembre dernier.
QUI SONT LES KURDES D’IRAK ?
Les Kurdes, aujourd’hui éparpillée sur quatre pays, à cheval entre la Syrie, la Turquie, l’Irak et l’Iran, ont caressé l’espoir, au sortir de la Première Guerre mondiale et sur les ruines de l’Empire ottoman, de se voir reconnaître et accorder un territoire autonome propre avec pour vocation la création d’un Kurdistan indépendant, comme le garantissait le traité de Sèvres signé en 1920. Cette population, actuellement estimée entre 20 et 40 millions, reste néanmoins unifiée par sa culture séculaire, voire millénaire.
En Irak, les Kurdes représentent 15 à 20% de la population irakienne, soit 5 à 6 millions de personnes, qui vivent principalement dans le nord du pays. Erbil est la capitale de cette région autonome kurde.
QUE SE PASSE-T-IL AVEC LES KURDES D’IRAK?
Le 25 septembre 2017, un référendum d’autodétermination avait lieu au Kurdistan irakien, sur l’initiative de Massoud Barzani, le président de la région autonome, malgré l’opposition du pouvoir central irakien et sans le soutien de la communauté internationale. Avec un taux de participation de 72,16%, le oui l’a massivement emporté, avec 92,73% des suffrages exprimés. Une crise sans précédent éclate alors entre Bagdad et Erbil : l’armée irakienne a été envoyée pour reprendre le contrôle des « territoires disputés », ces zones situées en dehors de la région autonome, mais où les Kurdes étaient parvenus à étendre leur emprise, au détriment de l’État islamique, dont Kirkouk fait notamment partie. Les peshmergas, ces soldats kurdes, n’ont néanmoins pas entravé l’avancée des troupes gouvernementales irakiennes et se sont, en grande partie, retirés de leur plein gré. Au moins une trentaine de morts est tout de même à signaler.
Des élections présidentielles et législatives, initialement prévues le 1er novembre dans le Kurdistan, ont été reportées, et Massoud Barzani a démissionné de ses fonctions.
KIRKOUK ?
Cette cité et province cosmopolite et pétrolière fut le symbole de la lutte et de la victoire des peshmergas, les soldats kurdes, contre l’État islamique. Avec 40% des réserves de pétrole d’Irak, et une forte contribution au PIB du pays, la ville est désormais emblématique du conflit qui oppose Bagdad et les Kurdes. Avec ses 850 000 habitant.e.s, la ville, bien que située à l’extérieur de la région autonome kurde, établie suite à l’invasion américaine de l’Irak en 2003, était de facto contrôlée par les Kurdes depuis 2014, et assurait près de la moitié des revenus kurdes. Bagdad en a depuis repris le contrôle.
QU’EN PENSE LE CANADA?
Refusant de prendre parti, Ottawa a annoncé suspendre temporairement le soutien dans la région, où les forces armées canadiennes sont présentes depuis trois ans et devraient y rester jusqu’en 2019 afin d’apporter formation et assistance aux soldats irakiens et kurdes pour lutter contre l’État islamique. Les forces armées canadiennes, environ 200 soldats, ont reçu pour ordre de rester à l’écart et de suspendre leurs activités de soutien jusqu’à la résolution du conflit.
Au niveau régional, l’Iran et la Turquie surveillent d’un mauvais œil la situation, craignant eux-mêmes une insurrection de la minorité kurde présente sur leur territoire. Hormis Israël (qui tire avantage du chaos dans cette région), le Kurdistan irakien n’a reçu aucun soutien international.