par claude lacaille. collaboration spéciale
Immigrants et lutte à la pauvreté
Un aspect important de la vie des immigrants est leur relation ombilicale avec leur pays d’origine. Saviez-vous par exemple que les Mexicains vivant à l’étranger, particulièrement aux États-Unis, ont envoyé à leurs familles en 2016 la rondelette somme de 30 milliards de dollars US, selon les données de la banque centrale de Mexico ? Il s’agit là de l’une des principales ressources du Mexique avec les exportations d’automobiles, le pétrole et le tourisme! Les remises d’argent de la diaspora du Honduras représentent 25,6 % du produit national brut (PNB), et pour Haïti, c’est 23 %.
Dans le monde, cette économie de la solidarité familiale des migrants représente des transferts de 600 milliards de dollars vers les pays pauvres ou en guerre; c’est trois fois l’aide publique internationale au développement. En 2015, les immigrants vivant au Canada ont envoyé dans leurs pays d’origine 25 milliards de dollars, alors que le gouvernement canadien n’a dépensé que 5,8 milliards en aide publique au développement durant la même année, ce qui ne représente que 0,28 % du revenu national brut. La cible fixée par les Nations Unies est de 0,7 %.
Ces apports économiques des immigrants permettent à leurs familles de sortir un tant soit peu de la pauvreté et servent avant tout à la consommation de biens de première nécessité : alimentation, vêtements, construction de maisons, également pour l’éducation et les soins de santé. Pour les personnes du Moyen-Orient, l’effort est mis sur la sécurité en parrainant des proches pour l’immigration. Un très grand nombre des personnes qui viennent s’établir chez nous, en plus de travailler à améliorer leurs conditions de vie et à rechercher la sécurité et la paix sociale, maintiennent des liens très forts avec la famille élargie et contribuent à améliorer le sort des êtres chers demeurés dans leur pays d’origine. L’un des gestes qu’ils réalisent régulièrement est le transfert de fonds. Or les coûts associés à ces envois demeurent élevés. La banque mondiale voudrait ramener le taux à 5 %, ce qui permettrait aux migrants d’économiser 14 milliards par année.
Une autre catégorie de migrants, environ 30 000 ouvriers agricoles, viennent travailler chaque année au Canada par l'intermédiaire du Programme des travailleurs agricoles saisonniers (PTAS). La majorité provient du Mexique, du Guatemala et de la Jamaïque. Le Centre international de solidarité ouvrière (CISO) résume ainsi la situation des travailleurs migrants chez nous : « La main-d’œuvre migrante temporaire joue un rôle très important dans notre système de production agricole de plus en plus axé sur l’exportation. Du côté du gouvernement fédéral, on légitime la venue de ces travailleurs en invoquant une pénurie de main-d’œuvre, alors que c’est plutôt les conditions de travail difficiles qui font que très peu de Canadiens cherchent à travailler dans ce domaine. En effet, qui voudrait travailler plus de 60 heures par semaine à faire un travail physique très exigeant, tout en étant payé un salaire dérisoire ? »
L’écart entre le niveau de vie des populations au Mexique et en Amérique centrale d’une part et celles de pays comme le Canada et les États-Unis se creuse dramatiquement. Le chômage chronique, l’absence de protection sociale et la pauvreté imposent aux populations vulnérables de tenter leur chance au Nord. Ils quittent leurs familles plusieurs mois par année pour amasser un pécule qui leur permettra de survivre avec un peu de dignité.
Ces citoyens et citoyennes contribuent largement à la prospérité de notre société et manifestent une grande solidarité familiale en soutenant leurs proches dans leur pays d’origine. Ils méritent notre respect.