par claude lacaille, collaboration spéciale
Nous, Occidentaux, avons souvent de l’Afrique la vision négative d’un continent de pauvreté, de famine et de guerres incessantes. Il s’agit pourtant également d’une terre d’espoir. Le Centre Songhaï en est une preuve irréfutable. En effet, empruntant leur nom d’une grande civilisation de l’Afrique de l’Ouest du 15ème siècle, un groupe d’Africains et d’amis de l’Afrique ont lancé ce projet révolutionnaire au Bénin en 1985 dans le but de redonner aux populations locales leur dignité, trop longtemps bafouée. Présentation d’un projet porteur d’espoir qui, à grande échelle, pourrait bien bouter la pauvreté hors d’Afrique.
L'idée de la création du Centre Songhaï est venue du Nigérian Godfrey Nzamujo, prêtre dominicain, docteur en électronique, en microbiologie et en sciences du développement. S’adressant d’abord à la jeunesse du continent, les promoteurs ont voulu mettre en valeur l’impressionnant capital environnemental de l’Afrique et faire renaître les valeurs enracinées dans les civilisations africaines : créativité, sens du bien commun, discipline, solidarité, etc.
D’abord circonscrit à un hectare de terre à Porto Novo, le centre Songhaï Ouando s’étend désormais sur 22 hectares. Au Bénin, trois autres villes rurales vertes ont vu le jour dans différentes parties du pays. Le modèle s’implante dans plusieurs régions du Nigeria, ainsi qu’au Liberia, en Sierra Leone et au Congo-Brazzaville. Cette initiative a été promue Centre d’excellence régional pour l'Afrique par les Nations-Unies en 2008.
Songhaï, c’est un processus de développement en pleine évolution, un laboratoire pour l’Afrique, un centre d’expérimentation technologique et un lieu de production agricole, de produits industriels et de services. L’idée est de former de jeunes entrepreneurs capables de reproduire le modèle Songhaï dans leur propre village. Ces derniers pourront ainsi contribuer au développement durable de leur communauté en créant des emplois et, du même souffle, combattre l’exode rural. Songhaï vise l’autosuffisance alimentaire, participe à l’éducation de la jeunesse du village et fournit des services tels que l’électricité et le gaz au bénéfice de toute la communauté.
Songhaï produit également des aliments de qualité qui sont ensuite commercialisés : volailles, chèvres, bovins, poissons et denrées agricoles, fruits, légumes, céréales, etc. En plus de machines agricoles, Songhaï fabrique des bouteilles, des seaux, des fours, des pièces de rechange avec impression 3D, des briques de terre cuite, des pavés, des tuiles, des filtres à eau, des frigos artisanaux, des oxygénateurs pour les étangs à poisson. Rien n’est perdu, tout est recyclé. Par exemple, le lisier du bétail produit le méthane pour les génératrices et sert d’engrais pour les champs.
Autre exemple : au Bénin, plus d’un enfant sur trois souffrent de malnutrition chronique par manque d’accès aux protéines. Songhaï s’est donc adjoint un partenaire français pour la culture de grillons qui permet de produire en grande quantité une farine riche en protéines à très bas coût.
Un tel projet essaime de plus en plus à travers tout le continent africain. Reproduit dans chaque ville et village, Songhaï ne peut qu’apporter du bonheur aux populations et contribuer à développer une société riche d’un capital écologique exceptionnel, d’un capital social jeune et dynamique, d’un capital technologique avancé et d’une économie durable et autosuffisante. Songhaï s’est engagé dans une révolution verte réalisée par la jeunesse africaine qui répond à l’appel avec enthousiasme et détermination. Ces jeunes meneurs, de vrais leaders, se réapproprient leur dignité et pourraient bien, à long terme, bouter la pauvreté hors d’Afrique !