Après la répression des manifestations des partisans du président destitué Mohamed Morsi, qui a fait plus de 600 morts, et l'instauration par l'armée de l'état d'urgence, la situation égyptienne est plus instable que jamais.
Quelques acteurs de la crise
Il s'agit, dans un premier temps, de deux blocs qui ne veulent pas et ne peuvent pas s'ouvrir au dialogue et qui sont aujourd'hui lancées dans des affrontements qui risquent de se transformer en une véritable guerre civile. D'un côté, il y a les Frères musulmans (soutenuspar le Qatar entre autres) qui n'ont plus rien à perdre puisque, depuis leur éviction du pouvoir, ils risquent de disparaître politiquement. Leurs points forts sont une bonne organisation dispersée sur l'ensemble du territoire égyptien, des activistes nombreux et déterminés car embrigadés depuis des années et des moyens financiers encore très importants.
De l'autre côté, l'armée du général Abdul Fattah el Sisi et la partie laïque de la population, ou du moins l'importante partie de la population qui ne veut pas l'établissement d'une «théocratie» dominée par les Frères musulmans. L'armée est soutenue discrètement par l'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis qui craignent pour leur propre gouvernance et aussi par les États-Unis qui ne veulent surtout pas une rupture ou une crise entre l'Égypte et Israël. «Les États-Unis ont un objectif en Égypte, leurs relations avec l'armée et tout faire pour éviter une rupture entre ce pays et Israël. Pour y arriver, ils étaient prêts à soutenir Moubarak, les Frères et demain un gouvernement égyptien un peu plus présentable».
Viennent se greffer à cela les Salafistes qui sont plus extrémistes (religieusement parlant) que les Frères musulmans. Ils ont soutenu l'armée car leurs ennemis principaux au sein des populations égyptiennes sont les Frères musulmans. Autre composante à prendre en compte, les Salifistes-Jihadistes plus ou moins liés à Al-Qaida, très présents dans le Sinaï. Leurs deux adversaires sont Israël et l'armée égyptienne.
Dénonciation de la violence
«La communauté internationale» condamne les violences et demande d'arrêter la répression. Qui en est à l'origine? Les Frères musulmans qui ont manifesté illégalement et qui ont été prévenus par les forces de l'ordre trois jours avant l'assaut (sans compter qu'ils ont tué une quarantaine des membres des forces de l'ordre) ou les forces de sécurité qui ont eu «la main très lourde» mais qui n'avaient peut-être pas le choix face aux provocations? Les Égyptiens seraient majoritairement en accord avec l'intervention de l'armée, et ce, malgré les événements sanglants des derniers jours. Certains diront que devant l'islam radical, le peuple égyptien est en état de «légitime défense».
Et demain…
Peut-on imaginer une démocratie en Égypte qui exclurait l'islam politique qui représente toujours aujourd'hui plus de 20% de la population? Doit-on parler d'un retour à la dictature militaire en Égypte sous le prétexte d'une guerre au terrorisme et au radicalisme religieux? Les conséquences de cette crise pour l'Egypte, le Moyen-Orient et même pour le monde, sont aujourd'hui incalculables tant les incertitudes sont profondes.